Au mois de septembre, alors que nous achevions la transhumance de notre seule ruche dans le potager expérimental de Pas à Pas, nous avons été alertés par un puissant bourdonnement en provenance des abeilles de notre ruche. Nous avons vu les abeilles sortir en masse de la ruche et aller en tout sens au-devant de celle-ci.
Cette transhumance était nécessaire vu que nous devions quitter l’endroit tout en sachant qu’un arbre allait être coupé à proximité. C’est notre charmante voisine qui a accepté d’accueillir la ruche non loin du poulailler. Nous nous sommes rendu compte qu’une centaine d’abeilles étaient retournées à l’endroit d’une construction que j’avais réalisée dans une pente pour maintenir la ruche droite. Je n’avais pas retiré cette construction. J’ai pu constater que cette mini-colonie déposait des grains de pollen sur cette construction, comme si elle revisitait ce lieu qui avait été un des endroits de villégiature. Ce manège était étonnant, d’autant que ce lieu était abandonné depuis quelques semaines. (voir la mini-vidéo ci-dessous)
Il est clair que la danse des abeilles devant la ruche avait un lien avec le fait que leurs copines se trompaient de quelques dizaines de mètres. Les abeilles de la ruche appelaient-elles celles qui s’évertuaient à laisser la nourriture devant l’ancien lieu ?
Florian a revêtu son habit protecteur pour chercher toutes les planches en bois et les ramener près de la ruche. Par miracle la centaine d’abeilles l’a suivi et est entrée, petit à petit, dans un rayon de quelques mètres de la ruche. Ce fut un spectacle incroyable de voir cette danse se terminer et tout ce petit monde est rentré dans la ruche pour vaquer à ses occupations.
Était-ce vraiment une danse ?
Karl von Frisch est le premier à avoir découvert certaines significations des danses des abeilles. Il en a identifié deux types de danses. La danse en rond et la danse frétillante appelée aussi oscillante ou danse en huit. Chaque danse fournit à la ruche des informations différentes concernant la découverte de la nourriture. La danse en rond pour la découverte d’eau sucrée, la danse frétillante pour la présence de pollen. Or ici, la danse était saccadée sans structure apparente et ne tournait qu’autour de la ruche comme un appel vers les abeilles perdues. En tout cas, le bourdonnement des abeilles était intense. (1)
Ont-elles enregistré aussi que nous sommes simplement là pour les aider avec beaucoup de bienveillance ? L’avenir nous le dira, lorsque l’on sera assez en symbiose avec elles pour oser s’approcher d’elles sans protection. Nous nous sommes dit qu’il y avait encore beaucoup de choses à apprendre sur leurs modes de fonctionnement.
Géry de Broqueville
(1) Benoit Tremblay, le chant sacré des abeilles, Québec, 2010, page 37.