Cette camomille porte différents noms comme la camomille allemande, sauvage, petite camomille, camomille vraie voire camomille tronquée. Le nom le plus juste est matricaire du nom de son genre Matricaria faisant partie de la famille des Astéracées comme les marguerites. Matricaria vient du latin Matrix, matrice, et donc du système de reproduction. Camomille provient du grec traduit en « pomme du sol » au vu de ses arômes de pomme en cas d’infusion. Cette plante a toute sa place au potager comme nous allons le voir.
L’origine de cette plante sauvage remonte à la nuit des temps. Les anciens Égyptiens suivi par les Grecs et les Romaines l’ont utilisé majoritairement dans leur pharmacopée. Cette plante aromatique a des propriétés anti-inflammatoire, antispasmodique, calmante, émolliente, fébrifuge, médicinale, stomachique. La Camomille romaine donne les mêmes effets mais est beaucoup plus amère. L’Europe, actuellement, privilégie l’utilisation de trois types de camomille :
- La Camomille matricaire Matricaria chamomilia, la plus douce et utilisée en infusion et en huile essentielle.
- La Camomille romaine Chamaemelum nobile, plus amère et utilisée aussi pour les HE.
- La Grande camomille Tanacetum parthenium, idem que la précédente.
Actuellement les botanistes ont beaucoup de mal à classer les différentes camomilles. En un mot comme en cent, il existe une grande confusion entre toutes les camomilles. Ainsi, il suffit de voir le nom scientifique des trois camomilles ci-dessus qui déterminent des genres différents. Pour être complet, il existe deux genres supplémentaires : les Leucanthemum et les Chrysanthemum. Il faut donc utiliser le nom scientifique pour bien définir la plante que l’on veut utiliser.
La culture de la matricaire
La culture de cette plante est facile. Les graines ont besoin de lumière pour se développer. Il suffit donc de les semer directement sur un sol préalablement humidifié. Si sa hauteur, à maturité est d’environ 60 cm, elle pousse dans à peu près tous les types de sol mais a une préférence pour les sols compactés. Elle se plaît dans les endroits ensoleillés mais ne daigne pas de goûter un mi-ombrage. Elle est frugale en eau et a une bonne résistance au gel. Les semis se fait de mars à avril. la floraison et la récolte des fleurs se déroulent de mai à octobre. Tout au long de sa floraison, L’élimination des fleurs fanées stimule l’apparition de nouvelles inflorescences.
La fleur de la Matricaire est assez particulière contrairement aux autres camomilles. Les capitules jaunes sont entourées d’un anneau de ligules (pétales) blanches qui dégagent une odeur caractéristique légèrement soufrée.
Les fleurs entrent dans la composition des infusions et huiles essentielles. Il n’y a donc aucune raison de ne pas la mettre dans le potager. Nous allons voir ce qu’elle apporte ainsi à son environnement.
Infusion de camomille pour les plantes ?
Elle attire les insectes pollinisateurs, mais c’est la composition chimique des fleurs de la matricaire qui nous intéresse. Les composés les plus importants sont le soufre, le calcium et le potassium. Pour les extraire, il existe quatre techniques : la macération, l’infusion, la décoction et l’extrait fermenté. Pour leurs descriptions, je vous renvoie sur la lecture de notre livre.
L’infusion de la camomille a des fonctions intéressantes. Une pulvérisation du sol à la fin de l’été va permettre aux plantes gourmandes comme le chou et la courge de reprendre des forces pour assurer de bonnes productions jusqu’au milieu de l’automne. Cette pulvérisation se fait avec une infusion non diluée. Par contre si l’on veut accélérer ou assurer une bonne germination des grosses graines, il est possible de les laisser dans un verre de tisane diluée à 5 % durant une heure au grand maximum. En clair, l’infusion de la matricaire favorise la germination, la pousse et le repiquage. Une tisane de camomille est pour les légumes racines et plus particulièrement pour la pomme de terre avec deux pulvérisations en jour racine, tôt le matin pour faire fuir les doryphores.
L’infusion de camomille dilué à 10% est un bon répulsif contre les taupins. Ce petit coléoptère, dont la larve est aussi appelée « ver fil de fer », parasite de nombreuses cultures potagères. La larve a une durée de vie de 4 ans et s’attaque aux légumes racines, à la racine pivot de la salade, aux bulbes, poireaux, asperges, fraisiers, dahlias et tulipes.
Macération comme insecticide ?
La macération de camomille est un insecticide et un fongicide. Comme vous le savez peut-être, nous sommes très prudents quant à l’utilisation des plantes en insecticide. Chaque ravageur a sa place dans la chaîne alimentaire et dans l’équilibre de la biodiversité de notre potager. Si vous êtes touché par la fonte des semis, ce que je ne vous souhaite absolument pas, il est possible de renforcer les graines en les plongeant durant deux heures environ dans une macération de camomille pure avant de les semer. Avec le reste de cette macération, il est encore possible de la pulvériser sur des feuilles atteintes par l’oïdium.
Dans le domaine de la viticulture, la matricaire est intéressante en pulvérisation de macération pure ou de tisane à 20% en cas de stress hydrique. Durant des périodes caniculaires ou de manque d’eau, une pulvérisation permet aux pieds de vigne de réguler l’évapotranspiration en stimulant le potassium. Cette action est valable aussi pour toutes les plantes du potager.
La matricaire en biodynamie
Enfin, la camomille matricaire est utilisée dans la préparation 503 pour le compost biodynamique. Elle fait un apport de substances azotées et de calcium permettant ainsi une croissance saine des plantes fertilisées. La camomille régule l’apport d’azote. Au lieu de paraphraser mon formateur en biodynamie, Jean-Michel Florin, je préfère lui laisser la parole dans la vidéo que vous allez découvrir en cliquant sur ce lien. Il explique dans une courte vidéo le rôle de la camomille matricaire dans la nature. Elle est une plante qui s’épanouit dans des terres écrasée et dures comme du béton. Elle est aussi une plante bio-indicatrice.
La camomille n’est pas utilisée comme telle dans le compost biodynamique. Elle subit une transformation dans l’intestin grêle d’un bovin durant la saison hivernale. Elle se décompose dans le sol sans perdre son odeur caractéristique. La transformation terminée renforce les plantes et leur donne une résistance contre d’éventuelles malformations.
Autant Rudolph Steiner a bien expliqué les raisons de l’utilisation de la corne de vache pour la transformation de la bouse et de la silice, autant il n’a donné aucune explication sur l’utilisation de l’intestin si ce n’est cette phrase mystérieuse : « organe le plus en communication avec l’intérieur et l’extérieure« . De même, il n’a pas eu le temps d’expliquer pourquoi, certaines plantes sont utilisées en biodynamie et pas d’autres. Pourquoi la Camomille matricaire ? Actuellement les biodynamistes se perdent en conjectures. Si l’on fait référence à l’humain, la camomille est utile en cas d’inflammations et de crampes dans notre système digestif. C’est le calcium qui agit pour nous soigner. Le lien entre système digestif et intestin du bovin serait-il à cet endroit ?
Une autre camomille
Pour la petite histoire, nous avons fait une expérience inusitée dans notre potager en 2020. Nous avions une matricaire romaine (Chamaemelum nobile) qui avait une fâcheuse tendance à prendre trop de place, à côté d’une ciboule welsche, tout en restant de petite taille (40 cm environ) dans un de nos bacs. Nous l’avons déplacé vers un de nos jardins des Simples. Il nous restait une belle place à côté d’un cardon qui végétait depuis le début du potager.
Notre surprise a été de taille, c’est le moins que l’on puisse dire. Le cardon est monté à plus de trois mètres et la camomille faisait ses fleurs à plus d’un mètre cinquante de haut ! Il s’avèrerait donc que ces deux plantes s’influencent positivement mutuellement. Avouons-le, ce changement de place n’a pas été mûrement réfléchi, il est le fruit du hasard.Nous allons placer en 2021 une ou camomille romaine et une matricaire à côté des artichauts pour voir si nous aurons les mêmes effets en termes de productivité de ce cousin du cardon.
Géry de Broqueville