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Buis, pyrale et champignons

La mignonne piéride du chou
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Vu l’angoisse des possesseurs de buis, comme, du reste, notre potager de Pas à Pas, il est temps d’écouter ceux qui ont réussit à juguler le désastre. En effet, étant chez des amis, je suis tombé sur un article d’une revue française me contant l’aventure des jardins du manoir d’Eyrignac dans le Périgord. Ce domaine est célèbre pour ses innombrables buissons de buis, sculptés de main de maître. C’est dire que la célébrité du château ne tenait plus qu’à une aile de papillon quand on pense aux attaques perfides des chenilles dont ce magnifique est issus !

Si la même famille, les Sermadiras, habite le manoir depuis plus de 500 ans, c’est bien la bataille de la pyrale qui fut la plus importante. Il semblerait qu’elle ait été gagnée par l’actuel propriétaire et le jardinier Laurent Chabane. Cela fait 23 ans que ce dernier veille sur les 10.000 buis dont certains pieds dépassent les 200 ans. Cette bataille a commencé en 2009 par l’arrivée d’un champignon invasif nommé Cylindrocladium buxicola (1) arrivé en droite ligne d’Asie. Ce champignon s’attaque évidemment aux buis les plus faibles que sont les Buxus sempervirens ‘suffruticosa’. Ce buis nain pousse très lentement et dessine les bordures des jardins historiques. Le champignon attaque les feuilles qui se couvrent de taches brunes et finissent par tomber. La maladie se répand sur toute la plante qui finit par mourir. Un peu plus tard est apparu dans toute la France, un autre champignon Volutella buxi qui donne le même effet.

Lutter contre les champignons

En avril 2016, il organise une journée d’étude pour la sauvegarde des buis. Cela lui a permis de découvrir dix ans de réflexions et d’actions pour lutter contre ce fléau avec des spécialistes. Il a très tôt compris que les plantes sont des êtres vivants. Elles réagissent comme nous. Elles sont beaucoup plus résistantes contre la maladie si elles reçoivent des traitements préventifs en vue de renforcer leur immunité.

Il n’y a pas de possibilité d’éradiquer les deux champignons. Par contre, Laurent Chabane a découvert que la plante est capable de résister quand elle reçoit une fois par mois en pulvérisation sur les feuilles un mélange d’extrait fermenté d’ortie (apport d’azote et de fer), de prêle (fongicide) et de consoude qui est un biostimulant. Deux fois traitements, par an, est versé autour du pied pour soigner les racines. Eyrignac utilise aussi des granulés produits par Axioma renforçant les défenses immunitaires de la plante. Ces granulés sont utilisés, sous forme de test, avec succès. Visiblement le produit n’est pas encore agréé par l’Assemblée nationale française.

La taille est assez sévère pour que l’air circule surtout au niveau du pied. Les outils sont nettoyés régulièrement. Si le terrain est trop humides, il faut le décompacter avec du sable. Les pieds sont arrosés avec un goutte-à-goutte, en cas de sécheresse. La combinaison de ces techniques a permis à Eyrignac de tirer son épingle du jeu.

La pyrale du buis

Arrivée en 2007, en Allemagne, accompagnant une plante en provenance d’Asie, la pyrale du buis, Cydalima perspectalis pond, sous la feuille de buis, environ 70 œufs. Ces derniers donnent autant de chenilles qui dévorent tout sur leur passage. Fin mars ou début avril, la chenille commence sa transformation en papillon (la nymphose). Cette première génération de papillon prend son vol et commence la reproduction fin mai, début juin. Elles hibernent et se réveillent au printemps suivant, affamées. L’Europe entière est touchée par le phenomène et tous les jardins historiques ont subi ces attaques comme Versailles, Vaux-le-Vicomte, Sceaux, Villandri sans compter les jardins des particuliers. La pyrale n’a pas de prédateur naturel d’autant que le buis exsude une substance toxique qui fait fuir les prédateurs. Quand Eyrignac a été atteint par le problème, Laurent Chabane a décidé d’y faire face par tous les moyens à sa disposition.

Les deux solutions apportées pour lutter contre cette chenilles indésirables est le piège à phéromone qui attirent les papillons mâles. Il faut placer le piège début avril à proximité des buis à protéger. Un piège couvre entre 10 à 20 mètres linéaires de buis. Cela vous donne une idée du nombre de piège à placer dans votre jardin. Eyrignac possèdent environ 10 ha de jardins et place une dizaine de pièges. Dix jours après le placement des pièges, les buis sont traités avec du BTK (Bacillus thuringiensis kurstaki) (2). Il est dommage que l’État belge exige que l’on soit détenteur d’une licence phytosanitaire. Ce produit efficace est donc réservé de facto aux professionnels ! Il n’est donc pas possible de le trouver en magasin, dans notre beau pays.

A l’heure actuelle, il est le meilleur produit utilisé en agriculture biologique puisqu’il participe à une lutte ciblée contre la pyrale, à l’opposé du pyrèthre, issus d’une plante, qui est un véritable insecticide, éliminant tous les insectes et ce y compris les abeilles. Ce dernier produit est à bannir définitivement de la panoplie des produits bio.

En conclusion…

A voir le témoignage de Laurent Chabane, la lutte contre les deux champignons et la pyrale n’est pas de tout repos. Une attention constante est nécessaire pour lutter contre ces trois envahisseurs. Le réchauffement climatique accélère le problème d’autant que les hivers sont de moins en moins froids et assez long pour régulariser les envahisseurs. La pyrale est maligne puisqu’elle sécrète une substance contre le gel ! Vous comprenez pourquoi au début du mois d’avril, malgré ses -13°C en Belgique, la pyrale s’est réveillée en pleine forme !

Il est possible que l’année 2020, où l’on a connu une chute vertigineuse des transport par avion en provenance d’Asie, coïncide à une baisse légère de l’arrivée de nouveaux envahisseurs. La mondialisation a cet effet pervers de l’arrivée par toutes les voies, maritimes, aériennes, terrestres, de nouveau envahisseurs de moins en moins contrôlables. Le réchauffement climatique ne fera qu’amplifier les problèmes et surtout étendre très rapidement les zones de contagions.

Vaux-le-Vicomte a choisi de remplacer son buis traditionnel par un buis plus résistant appelé Buxus sempervirens arborescens. Ce dernier résiste aux champignons actuellement et à la pyrale, mais il n’est pas sûr que ce soit le cas dans la durée. La société belge Herplant a créé des buis hybrides qui résistent aux envahisseurs (3). Avec l’expérience d’Eyrignac, la situation ne semble plus désespérée.

Géry de Broqueville

(1) Cylindrocladium buxicola et Volutella buxi sont deux champignons de l’espèce des ascomycètes de la famille des Nectriaceae dont l’origine est inconnue. Ces champignons provoquent la maladie du dépérissement du buis.

(2) Pour en connaître plus, je vous invite à lire les analyses scientifiques sur ce produit qui est sélectif puisqu’il ne s’attaque qu’aux chenilles et non pas aux autres insectes. Mais attention, La toxicité du BTK pur pour des animaux à sang chaud n’est pas nulle. Des expériences faites sur des rats montrent une toxicité pulmonaire non négligeable. Les rayons ultraviolets solaires dégrade le BT assez vite, de même quand la pluie lessive le buis.

(3) Si le doryphore a été un des premiers envahisseurs arrivés dans les package des soldats US en 1918, le frelon asiatique (Vespa velutina) est le plus célèbre des nouveaux ravageurs. Nous devrons faire face à la chenille processionnaire du pin (Thaumetopoea pityocampa) apparue en Wallonie en 2018 qui a des conséquences urticantes pour l’homme et les animaux. Le coléoptère Diabrotica virgifera, venu d’Amérique s’attaque aux racines du maïs. Le papillon Paysandisia archon, en provenance d’Argentine, ravage déjà les rares palmiers belges ! Il y aura matière à bien observer la progression des envahisseurs qui risquent de s’acclimater chez nous. Restons optimistes tout de même !

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