Depuis que je m’intéresse, aux plantes qui nous entourent, celles-là mêmes qui nous nourrissent, nous abritent, nous habillent, je me rends compte combien le scientifique ferme des portes sans arrêt, sous différents prétextes. Les chercheurs du XVIIIe au XXIe siècle sont généralement décriés lorsqu’ils ne pensent pas dans la lignée de ceux qui ont trouvé quelque chose ou qui se trouvent dans une posture innovante. Le scientifique qui annonce une innovation, une découverte, une avancée, est regardé avec méfiance par ses collègues. Ces derniers ne demandent qu’une chose : la preuve scientifique de ce que le découvreur annonce.
Le vieil adage de Galilée (1563-1642) est toujours d’actualité : « tout ce qui n’est pas mesurable, n’existe pas ». Or pour mesurer, il faut des appareils de mesure. Étrangement, ceux-ci arrivent toujours longtemps après les découvertes comme s’il y avait une envie folle de faire oublier au plus vite les nouveautés. Le scientifique ne devrait-il pas être un curieux avant toute autre chose ?
Le cerveau humain est capable de découvrir, mais il n’est pas aussi fertile pour inventer une technique de mesure qui apporte une preuve indépendante de celle apportée par le découvreur. Généralement, ces machines sont récusées par le monde scientifique officiel qui, d’un revers de la main, élimine trop souvent, ce qu’ils vont appeler des pseudo-découvertes voir du charlatanisme.
Bon nombre de chercheurs et non des moindres, dans le domaine de l’électricité, par exemple, comme Alessandro Volta (1745-1827), Nikola Tesla (1856-1943) ou Georges Lakhovsky (1869-1942) ont travaillé sur les relations entre l’électricité et les plantes. Toutes ces recherches ont été considérées comme marginales ou ont été condamnées par leurs pairs. Certains de ces chercheurs sont quand même entrés dans l’histoire de la science par la grande porte pour d’autres recherches que le monde scientifique officiel de l’époque a validées. Certains découvreurs tels Henri Dutrochet (1776-1847) pour sa découverte majeure de la montée de la sève par électro-osmose, erronément attribuée à Théodore Schwann (1810-1882), n’ont pas été retenus dans le panthéon des découvreurs. Il en va de même pour Edouard-Léon Scott de Martinville (1817-1879) le premier qui a enregistré sa voix fredonnant « Au clair de la lune » sur un support, invention majeure et oubliée, alors que Thomas Edison n’était pas un inventeur, mais un homo économicus génial !
Homo scientificus ?
Selon Wikipedia, « la science est l’ensemble des connaissances et études d’une valeur universelle, caractérisées par un objet et une méthode fondés sur des observations objectives vérifiables et des raisonnements rigoureux« . Cet ensemble de connaissances est déterminé par la communauté scientifique qui fait loi. Celle-ci « désigne, dans un sens assez large, l’ensemble des chercheurs et autres personnalités dont les travaux ont pour objet les sciences et la recherche scientifique, selon des méthodes scientifiques« , toujours selon Wikipedia.
Mais alors, le découvreur est-il vraiment un scientifique ? Oui, s’il soumet sa nouvelle théorie à la première définition. Mais dans une démarche scientifique, le plus important semble que la communauté scientifique donne son aval.
Dans les biographies des centaines de découvreurs, l’on voit que chacun se doit de présenter sa découverte à ses pairs. Très souvent, la première présentation est un enterrement de première classe.
Le problème est que la communauté scientifique est composée d’êtres humains. Ces derniers ne sont pas exempts de certains défauts qui caractérisent l’espèce humaine comme la jalousie, l’appât du gain, la notoriété, l’étroitesse de vue. Très rarement, la communauté des pairs accepte une nouvelle découverte dès la première présentation renvoyant le découvreur à ses chères études.
Homo scientificus versus economicus
Il y a probablement des questions d’ancienneté, d’égo ou de jalousie qui entre dans ce schéma de pensée étroite. Mais dans la majorité des cas, il y a, surtout actuellement, la volonté de décrocher la timbale en or, c’est-à-dire accrocher les fonds nécessaires pour continuer la recherche voire mieux encore faire breveter ses inventions pour les vendre au plus offrant. Bon nombre de ces inventions qui pourraient être très utiles pour l’avancée de la science végètent au fond des tiroirs de multinationales (1). Et donc la science n’évolue actuellement qu’à coup de millions qui rapportent des milliards. Il suffit de voir la querelle qui a existé de nombreuses années pour déterminer qui était le découvreur du VIH-Sida : le professeur français Montagnier ou l’américain Robert Gallo ? L’octroi du prix Nobel de médecine au premier a fait taire le second quant à la primauté de la découverte, mais tous les deux se partagent les royalties engendrées par le bénéfice de la vente des tests de dépistages.
Pour les sciences qui concernent la nature, le vivant, le système est le même, voire pire. C’est ce que dénonce depuis des années Lydia et Claude Bourguignon. Ils n’hésitent pas à attaquer de front l’INRA (Institut national de recherche en agriculture) qui est surpuissante en France. Dans cette vidéo que vous pouvez voir sur Facebook, le couple est très clair et n’hésite pas à blâmer le monde scientifique qui n’est plus qu’à la solde des multinationales. Et que dire encore de ces multitudes de rapports scientifiques qui démontrent que le Glyphosate est bon pour la santé humaine alors que pas un seul de ces scientifiques n’oserait boire ne fût qu’une seule tasse de ce produit, à titre d’expérience… Il aura fallu le procès gagné d’un jardinier américain contre Monsanto en août dernier pour mettre à mal le travail de centaines de scientifiques ayant accepté de travailler pour une multinationale. Auront-ils un jour du mal à se regarder dans le miroir, le matin ?
Fort heureusement, tous les homo scientificus ne sont pas mauvais. Ils en existent qui font honnêtement leur travail de chercheur en faisant progresser la science… que dis-je, voyons, la connaissance humaine dans des domaines très divers, sans arrière-pensée, comme le couple Bourguignon.
Laissez-nous expérimenter
Entendons-nous bien, si nous abordons la question de la science sous cet angle-là dans cet article, c’est pour nous prémunir d’objections déjà entendues, à propos d’expériences que Florian et moi-même, réalisons dans notre potager expérimental. Nous connaissons les arguments des détracteurs, bien qu’ils aient la liberté d’exprimer leurs désappointements face à la pré-science, celle réalisée par les expérimentateurs et peut-être découvreurs que nous sommes.
Pas à Pas pourrait se contenter de semer, repiquer, récolter ses 250 kilos de légumes chaque année et former les personnes désireuses d’arriver aux mêmes résultats. Mais nous avons le désir d’expliquer ce que nous expérimentons dans le potager en ouvrant à nouveau les portes que la science avait décidé, dans les temps anciens, de fermer.
Géry de Broqueville
(1) Pour découvrir les brevets ou des travaux universitaires, il suffit d’aller tout simplement sur le moteur de recherche « Google Scholar« .