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Le saule

Yourte construite en saule
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Temps de lecture : 3 minutes

Dans le potager expérimental de Pas à Pas, nous plantons chaque année quelques arbres en vue de réaliser un jardin-forêt nourricier. C’est en janvier 2019, que nous avons démarré ce véritable espace, sur la partie haute des escaliers. Nous avons planté plusieurs arbustes qui donneront au fur et à mesure son lot de fruits en tout genre. Nous les décrirons petit à petit dans ce blog.

Arrêtons nous sur un arbre qui est, à priori, non nourricier (1) pour l’Homme mais bien pour les plantes et les animaux. Le saule fait partie de la famille des Salicacées. Les écorces des arbres de cette famille sont composées, notamment, d’acide salicylique. Or cet acide est la molécule principale composant l’aspirine !

L’aspirine, mélangée à de l’eau, est souvent utilisée pour prolonger la durée de vie des fleurs coupée (1 comprimé 500 mg pour 5 litres d’eau). L’aspirine est un anticoagulant naturel.

Il a été prouvé que l’acide salicylique permet de soigner une blessure provenant de l’acide abscissique chez la plante. Cette dernière est une hormone de stress libérée par toutes les plantes en réponse à une blessure ou une maladie. Elle induit la fermeture rapide des stomates et la fermeture des secteurs blessés. En freinant cette réaction, l’acide salicylique freine l’assèchement de la plante. Elle lui permet de guérir en produisant notamment de nouvelles racines.

Quel saule ?

Les variétés de saule sont multiples. Le plus intéressant est le saule pleureur (Salix babylonica) bien connu des jardiniers. Il se plante très facilement et grandi à une grande vitesse. C’est celui qui produit le plus d’acide salicylique.

Selon la variété, à l’âge adulte la hauteur oscille entre 5 et 25 m de hauteur. Il est donc important de bien le placer dans son jardin pour qu’il ne crée pas d’ombres intempestives. En ces temps où le manque d’eau, surtout en période estivale, se fait ressentir, il faut bien réfléchir à la variété que l’on va planter, en automne. Le saule est gourmand en eau. Le saule pleureur est planté à coté de ruisseaux, de mares ou dans des sols humides. Il existe une version naine de ce saule qui est le Salix caprea « Kilmarnock » (autrefois appelé « Pendula ») qui a été créé en Angleterre au XIXe siècle pour diminuer son amplitude et sa hauteur, maximum 3 m. Ce dernier saule peut ainsi se placer dans les petits jardins ou les balcons.

L’eau de saule pour l’arrosage et le repiquage

La puissance de l’eau de saule dépendra évidemment  de la concentration en acide salicylique du résultat obtenu. Celle-ci est dépendante du nombre et l’épaisseur des boutures de saule utilisée ainsi que du volume  d’eau dans lequel on les aura plongées. Cette technique était utilisée avant la commercialisation de l’hormone de bouturage de synthèse. 

Pour obtenir une eau de saule liquide : Trempez pendant 24 heures des branchettes de Saules et récupérez en l’eau. En si peu de temps, l’acide acétylsalicylique peut avoir un effet puissant selon l’usage que l’on veut en faire dans le potager.

Vous pouvez également utiliser l’eau de saule pour les arrosages des plantes à fleurs nouvellement plantées, des arbustes, des arbres et la plupart des plantes vivaces. Le bouturage des plantes à fleurs est facilité par cette eau de saule par l’amélioration et la stimulation de la croissance de nouvelles racines.

Le gel de saule pour le bouturage et la plantation

Coupez des tiges de saule bien épaisses (minimum 3 cm de diamètre) pour obtenir un gel très concentré. Placez-les dans une bassine ou un seau d’eau pendant environ un mois à 6 semaines, sans changer l’eau. Le gel devrait alors s’être formé, et vos branches seront prêtes à être plantées au jardin. Conservez le gel dans des pots de yaourt en verre pour l’utiliser à des fins de bouturage voire de marcottage. Attention, ce gel ne se conserve pas longtemps : préparez régulièrement du gel de saule pour avoir toujours de l’hormone de bouturage à disposition.

Le gel de saule n’est pas un produit miracle. il est évident qu’il faut suivre les bonnes pratiques pour effectuer un bouturage efficace. Tremper les deux extrémités à bouturer dans le gel donne un gage de réussite supplémentaire.

Pour ce qui est de la plantation d’un arbre, il est intéressant de praliner les racines avec du gel de saule pour permettre à la plante de correctement redémarrer avec vigueur dans son nouveau sol.

Le saule aux mille usages

Nous n’avons vu que l’aspect du saule en tant qu’appui pour le potagiste. Mais en réalité le saule a mille pouvoirs. Si le saule est la matière première de la vannerie, il est un allié de l’abeille depuis plus de 100 millions d’années surtout le Salix bockii qui fleurit de la fin de l’été à la fin de l’automne, le S. triandra « Semperflorens » qui présente des chatons du début du printemps jusqu’en été et S. pentandra qui dispense de grande masse cotonneuse à la belle saison. Les feuilles du saule « à feuille de laurier » qui sont visqueuses une assez longue période, fournissent une abondante matière à propolis.

Le saule allié de la faune

Affiche réalisée par le département du Bas-Rhin en 1995 par M. Tabourin (2)

Le saule et spécialement le « têtard » est aussi un allié de toute une faune intéressante pour le potager comme la chouette, le hibou, la chouette chevêche, le hérisson, l’orvet, la belette, la fouine, le crapaud commun. Quelques uns de ces animaux sont mal considérés par le potagiste, comme la fouine ou la belette. Pourtant ils font parties de l’équilibre de la biodiversité. Il abrite aussi les mésanges, les moineaux, les grimperaux, les troglodytes et l’écureuil qui y amasse ses trésors. Vraiment, le saule têtard est un véritable havre de paix et de biodiversité.

Et puis il y a le saule que l’on utilise comme décor dans le jardin. Il est même possible de construire une cabane en saule (Photo ci-dessus). Dans certaines communes, vous devez demander un permis pour construire une cabane. Le potagiste peut en construire une en saule dont la base est constituée de saules enracinés et entrelacés, ce qui ne nécessite pas d’autorisation. Il est possible de renforcer les berges d’un étang, de construire des bacs de permaculture comme les plessis du Moyen-âge dans les jardins des plantes médicinales. Nous n’avons pas assez de place pour tout décrire tant les usages sont multiples. (2)

Géry de Broqueville

(1) En période de disette, la feuille de saule a déjà été utilisée, moulue et assemblée avec la farine de blé, pour enrichir le pain. Les Inuits du Canada mangent encore les bourgeons de certains saules. En Chine, les feuilles de saules ont été employées pour fabriquer le thé du pauvre.
(2) Dominique Brochet, Le saule, la plante aux mille pouvoirs, édition de Terran, 2016. Dominique Brochet a développé une pépinière et un jardin en Champagne dont l’arbre le plus important est le saule. Pour comprendre ce bel arbre, passez-y faire un tour au « Jardin de la Presle« , non loin de Reims.
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