Les saponaires portent bien son nom puisqu’elles ont toutes, un principe actif de base qui est la saponine. Qui dit saponine dit savon. Ce sont donc des plantes qui ont une caractéristique émulsifiante et moussante..Nous allons voir plus en détail ce type de plante qui ne sont, à priori, pas très présente dans le potager si ce n’est pour son caractère décoratif.
Les Saponaria appelées aussi « plantes à savon » ou « herbes à savon », regroupent une vingtaine d’espèces vivaces ou annuelles. Elles sont originaires des prairies et des zones montagneuses d’Europe et d’Asie du Sud-Est. Cette plante ne demande pas d’entretien et pousse comme si de rien n’était. Elles font partie de la famille des Caryophyllacées (1) avec un feuillage caduc, composé et étroit. Le feuillage disparaît pendant l’hiver et repousse en mars/avril. Les fleurs vont du rose au violet. A maturité sa hauteur oscille entre 45 et 60 cm et sa largeur est de 50 cm environ. Elles se plaisent au soleil et dans le mi-ombre et ont un besoin moyen en eau. Ces plantes ont une belle résistance au froid. Elles aiment les sols argileux ou calcaires, avec une belle présence d’humus, du moment qu’ils soient frais. Elles se développent aussi dans les sols rocailleux. Les marocains possèdent deux espèces : Saponaria glutinosa et Saponaria vaccaria, toutes les deux originaires notamment d’Afrique du Nord. (2)
Principes actifs
Les graines de la Saponaire contiennent de la Saponine. Cette dernière est un groupe de molécules détergentes et émulsifiantes, naturellement produites par certaines familles de plantes et même d’animaux. Les saponines appartiennent à un groupe de glucosides huileux naturels qui moussent donc en abondance dès lors qu’on les agite dans une solution. Les racines, nettoyées et séchées, peuvent servir dans la fabrication d’une poudre pour se laver les mains. On l’a compris, le principe actif le plus important est un Saponosides entre 2 et 5 %.
Les saponines ont une double caractéristique à savoir d’être hydrophiles (soluble dans l’eau) et lipophiles (soluble dans la graisse), Cette double caractéristique donne un effet tensioactif, capable de générer une émulsion et permettant aux saponines de retirer la graisse de surface.
Les Saponines consommées ne représentent quasiment aucun risque toxicologique quand elles sont présentes en faible quantité. Elles peuvent être toxiques et dangereuses si elles sont directement injectées dans le sang, dissolvant rapidement les globules rouges. Attention, les racines sécrètent une substance toxique pour la vie aquatique.
Liste des plantes saponines
- le lierre grimpant (Hedera helix).
- Deux savonniers (Sapindus saponaria et Sapindus mukorossi) : Son écorce et son fruit contiennent une riche concentration en saponine qui est ainsi utilisée en Asie pour fabriquer du savon naturel, d’où son nom de « savonnier ». Les noix de Sapindus sont utilisées comme alternative écologique aux lessives chimiques classiques. Dans ce cas, les fruits sont appelés « noix de lavage ». Deux à trois coquilles placées dans un sac, dans le tambour d’une machine à laver, permettent de laver le linge à partir de 30 °C, les coquilles peuvent être utilisées plusieurs fois.
- Endod (Phytoloacca dodecandra) plante vivant à plus de 600 m d’altitude en Afrique tropicale et australe. L’Endod est aussi employé dans la médecine traditionnelle africaine pour les soins de la peau : dermatoses, prurit, mycoses…
- Le Quillay ou Bois de Panama (Quillaja saponaria). La saponine QS 21 dérivée de son écorce a un rôle d’adjuvant pour des vaccins ; ces propriétés auraient suscité des récoltes sauvages dans son pays d’origine et causé le déclin de l’espèce. L’écorce attiree les insectes bénéfiques, notamment les chrysopes, les syrphes, les coccinelles et les guêpes.
- Koelreuteria paniculata (savonnier) : un petit arbre de la famille des Sapindacées originaire de Chine et Corée. On le trouve assez souvent planté comme un arbre ornemental dans les parcs et jardins des villes européennes.
- Aesculus hippocastanum (marronnier d’inde) : Grand arbre originaire des Balkans, de la famille des Sapindacées. Cet arbre se trouve dans bon nombre de villages du sud de la Belgique ou de France.
- De nombreuses espèces de la famille des Solanacées dont la tomate, la pomme de terre ou le Quinoa.
Et les animaux ?
Dans les années 1990, on a découvert que des animaux marins produisaient aussi de la Saponine comme les concombres de mer, étoiles de mer, éponges et zooplancton. On ignore encore les utilisations possibles.
Ses utilisations
Plantes médicinales pour les humains
Cette plante possède des propriétés qui stimule la sécrétion de la bile, purifie l’organisme, en favorisant l’élimination des toxines. Elle est diurétique et vermifuge. On l’emploie contre les rhumatismes et la goutte, contre certaines infections de la peau comme l’acné et comme expectorant, sous forme d’infusion, en cas d’angines, aphtes. Les Romains en mettaient dans leur bain pour guérir les démangeaisons. Les léproseries l’utilisent pour nettoyer les plaies des lépreux.
Des scientifiques d’Afrique du Sud ont compilé la littérature scientifique des quarante dernières années pour s’intéresser aux propriétés des plantes riches en saponines . Leurs buts est de trouver les meilleures plantes pour lutter contre les virus comme le Covid. « Passant en revue 68 espèces, ils rappellent que leurs propriétés moussantes, antimicrobiennes, virucides, bactéricides et fongicides pourraient constituer une arme supplémentaire dans la lutte contre le Covid-19 et les virus en général« . (3)
En cuisine
Au vu de son amertume, la Saponaire n’est jamais utilisée en cuisine. Au Moyen-Orient, on utilise l’infusion d’eau et de la Saponaire pour préparer des desserts nécessitant une gélification, en particulier une guimauve arabe dite « Natif », et pour la fabrication du Halva (Turkish Halva).
La saponaire au potager
La saponine joue un rôle protecteur dans la lutte contre les herbivores, champignons ou encore bactéries. Nous verrons cela dans l’article suivant consacré, notamment, à ces mécanismes de défense.
Les variétés
Saponaria officinalis
Courante, elle peut être envahissante puisqu’elle se reproduit par ses rhizomes traçants. Elle fleurit longuement de la fin du printemps au début de l’automne.A l’état sauvage, elle est vivace et se rencontre au bord des talus, des fossés et des sous-bois.
Saponaria ocymoides.
La Saponaire faux-basilic fleurit à partir du début de l’été en juin-juillet avec de multiples fleurs rose vif. Sa taille est nettement plus petite avec ses 15 cm de haut bien qu’elle s’étende comme sa grande sœur. C’est une vivace tapissante avec ses tiges souples et couchées. Elle est très rustique et est capable de coloniser son milieu rapidement au dépens d’autres espèces. C’est pour cette raison qu’on la met très souvent en bac pour qu’elle ne colonise pas trop son espace.
Quillaja saponaria molina
Le Quillay ou Bois de Panama contient dans son écorce une forte teneur en saponine QS 21. Cette molécule a un rôle d’adjuvant pour certains vaccins utilisés contre tous les virus dont celui du Covid-19. (4) Ses propriétés auraient suscité des récoltes sauvages dans son pays d’origine et causé le déclin de l’espèce. L’écorce de savon est également réputée pour attirer les insectes bénéfiques, notamment les chrysopes, les syrphes, les coccinelles et les guêpes. Cet arbre se trouve majoritairement au Chili et au Pérou, jusqu’à 2000 m d’altitude. Il a été implantée en Californie à partir du début du XXe siècle.
Ses saponines en grande quantité sont également la raison pour laquelle cette plante figure sur les listes de plantes toxiques et Quillaja saponaria est répertoriée dans Poisonous Plants of California. Comme indiqué dans cet ouvrage, ces toxines affectent généralement les animaux à sang froid. L’estomac des animaux à sang chaud est blessé quand les saponines sont absorbées, Ceci dit, les plantes contenant des saponines sont généralement amères au goût et sont donc rarement broutées. (5)
En conclusion…
Si nous avons parlé du Bois de Panama ci-dessous, c’est pour découvrir ses propriétés de lutte contre les virus. Cet arbre de 10 m de haut ne vit pas en Europe. Il est donc intéressant de comprendre les apports des Saponines dans notre potager à de plus faibles quantités. Nous avions bien compris que les saponaires s’utilisent dans le nettoyage de la maison ou du corps humain. Et tant qu’à faire pour être autonome dans la maison, plantez des courges luffa (Luffa cylindrica) qui deviennent d’excellentes éponges végétales. Luffa et saponaire font bon ménage !
Dans la liste, ci-dessus, des plantes contenant de la Saponine, nous avons des solanacées que nous mangeons tous les jours sous forme de tomates, de pommes de terre ou d’aubergine. Or elles ne sont normalement pas toxiques pour l’être humain. Nous verrons dans l’article suivant la toxicité (ou non) de ces plantes.
Géry de Broqueville
- La famille des Caryophyllacées comporte notamment les Dianthus (œillet), les lychnis (Coquelourde) ou la Silène (Compagnon rouge).
- Bellakhdar Jamal, La pharmacopée marocaine traditionnelle, volume 2, ed. Le Fennec, 2020, p.551. l’auteur donne en détail les principes actifs de ces deux saponaires.
- Cette information provient de ce site Internet. Ces scientifiques relèves deux plantes africaines riches en saponine : l’aubergine africaine (Solanum macrocarpon) et le dattier du désert (Balanites aegyptiaca).
- Une étude scientifique d’une équipe de scientifiques brésiliens et uruguayens datée de 2019 montre le processus d’intégration des molécules de Saponine dans la recherche de moyens de lutte contre les virus.
- San Marcos growers.