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Cultiver sans eau, est-ce possible ?

Cultiver sans eau, est-ce possible ?
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Temps de lecture : 4 minutes

Une vidéo parue sur Internet, au plus fort de la canicule de 2022 a fait polémique auprès de nombreuses personnes et associations de permaculteurs…Cultiver sans eau, est-ce possible ? Nous allons faire le tour de la question à propos de cette vidéo. Nous avons interrogé aussi un maraîcher belge pour découvrir ses actions en cas de sécheresse. Arroser ou ne pas arroser, that’s the question !

Marc Mascetti a peut-être raison pour ce qui est de sa terre. Tout d’abord, sa terre se trouve en région parisienne, plus particulièrement dans le nord de l’Essonne. Il habite le village de Marcoussis situé dans la région naturelle de Hurepoix. La pluviosité est de 600 et 800 mm par an. En 2022, La France a un déficit de pluie globale d’environ 45%, ce qui n’est évidemment pas favorable à la culture sans eau. Le sol de cette région est marneux. Ce terme signifie que la terre est composée de roches sédimentaires, avec un mélange d’argile et de calcaire. Sa terre retient assez bien l’eau.

Ce maraîcher explique aussi que même en creusant jusqu’à 130 m de profondeur, il n’a pas trouvé d’eau. Il part du principe qu’il faut laisser la plante chercher, par elle-même, comment devenir résiliente. Il ne s’agit pas d’arroser puisqu’il n’y a pas d’eau aux alentours.

Du labour pour remonter l’eau ?

Ce qui est frappant chez ce maraîcher est qu’il travaille le sol en le labourant, pour y insérer les mauvaises herbes (1) dans le sol, pour que les vers de terre les décomposent. Il est clair qu’il ne va pas dans les détails lors de son explication. La décomposition des matières organiques est réalisée par des milliers de micro-organismes qui existent dans un sol vivant.

Or pour obtenir un sol vivant, la pire manière est justement de le labourer. Ce maraîcher ignore peut-être que certains micro-organismes se trouvant dans le sol n’ont pas besoin d’air pour vivre. Le labour les détruit en retournant les mottes de terre. Nous supposons que ce maraîcher ne laboure plus comme au XIXe siècle où les socles de charrue atteignent parfois les 50 à 80 cm de profondeur. Donc l’enfouissement des « mauvaises herbes » se fait proche de la surface.

Nu comme la main

En regardant bien l’ensemble de sa terre, nous ne voyons qu’un désert brun. Il n’y a aucun arbre sur cette parcelle de terre. Vous savez combien il est important de planter des arbres pour apporter de la fraîcheur et… de l’eau aux plantations de légumes. Les arbres font offices de pompes à eau tant pour eux que pour toutes les plantes avoisinantes.

Bien sûr, nous pensons à des arbres nourriciers comme le châtaignier, la pommier, le chêne, le noyer, le cerisier, plantés en alternance. C’est une bonne manière d’enrichir le sol, en automne. En outre, cela permet de lutter contre la monoculture et d’augmenter les revenus.

Et le couvre-sol ?

De plus, il ne place aucun couvre-sol entre les lignes de légumes pour préserver la fraîcheur voire l’humidité qui pourrait se trouver dans le sol. Est-ce réaliste pour un maraîcher de couvrir le sol apparaissant dans l’inter-rang ? Nous avons interrogé Jérémy Verhelst, fondateur de la Finca situé à Wezembeek-Oppem (2). La sécheresse n’est pas un problème pour lui. Il qualifie même cette année comme excellente. Bien sûr, certains légumes n’ont pas résisté comme le fenouil. De toute façon, ce légume n’est pas fait pour de telles chaleurs. Jérémy ne couvre pas son sol mais il le bine (3). S’il le fait mécaniquement, la profondeur atteinte est de 5 cm. Si c’est manuel, ce sera de l’ordre de 1 à 2 cm. Il bine quand il a le temps. Sa terre argileuse retient bien l’eau. Il est probable que les agriculteurs de Flandre qui ont une terre plus sablonneuse auront eu plus de problèmes de sécheresse, cette année.

Une partie de la terre de la Finca

Bio sans label

Nous ne lui donnerons jamais tort sur ce sujet. Marc Mascetti le dit et le répète à qui veut l’entendre qu’il cultive sans pesticide ni insecticide. Il refuse le label européen bio Ecocert car ce dernier permet, dans certains cas, l’utilisation de produits chimiques. (4)

Il résume fort bien sa pensée à propos des légumes fainéants. Plus ils sont arrosés, moins le légume n’aura de goût. Ce dernier n’ira pas chercher ses oligo-éléments nécessaires à sa bonne croissance, en profondeur. Il deviendra paresseux.

Faire remonter l’eau : une technique ancestrale ?

Cependant, une des phrases de Marc m’intrigue. Il dit en substance : « Comme nous ne pouvons pas donner de l’eau par la surface, nous on la fait remonter par le sol« . « Le Parisien » ajoute : « c’est une technique qui se transmet depuis trois générations« . Cette technique semblerait être la même que celle de Pascal Poot (5), à propos des tomates. Les deux maraîchers donnent 1 m2 à chaque plants de tomates pour qu’ils puissent courir le long du sol. Ils ne taillent ni ne placent des tuteurs. Les plants de tomates sans tuteur crée des racines supplémentaires qui puisent dans d’autres minéraux à d’autres endroits de son mètre carré octroyé.

Pascal Poot produit des milliers de tomates sans apport d’eau, sauf à deux moments précis. Il arrose abondamment le terreau au moment des semis et au moment du repiquage. Aucun arrosage supplémentaire n’est effectué durant l’année. Il produit, selon les variétés, entre 10 et 25 kg par pieds.

Une partie des champs de Pascal Poot, non loin de Lodève

Donc, une légère différence existe entre les deux producteurs. Marc Marcetti signale qu’il n’a aucun apport d’eau au vu de son impossibilité d’avoir un forage, il semble clair qu’il ne peut pas arroser abondamment au moment du repiquage. Il en va de même pour ses autres cultures.

Cependant, le mystère reste entier : comment fait ce maraîcher de l’Essonne pour faire remonter l’eau, alors qu’il n’a pas d’arbres à disposition. Le secret serait donc d’enfouir les mauvaises herbes dans le sol. Ce système créerait une sorte de zone intermédiaire humide entre la surface du sol sec et le sol plus profond qui est d’office humide. Ensuite, il laisse faire la nature. Il accepte d’avoir un moindre rendement mais obtient des légumes avec une haute qualité gustative. Au fond pourquoi pas ! (6)

En conclusion

Il y a probablement d’autres explications à ce phénomène de culture sans eau. La rosée n’est pas à négliger. Deux types de rosée existent, celle du soir et celle du matin. Il est évident que Marc et Jérémy en profitent sans s’en rendre compte. Mais là nous devons entrer dans des explications plus détaillées que nous aborderons prochainement pour mieux comprendre les apports de ce que l’on croit être minime.

Cette vidéo a le mérite d’exister. Elle réveille un bon vieux débat. Cet agriculteur s’adapte à l’aridité de son terrain depuis trois générations, semble-t-il. Il faut peut-être accepter de moins produire tout en ayant des légumes de meilleure qualité.

Dans notre serre, nos tomates ont reçu très peu d’eau cet été. Les plants produisent autant de tomates qu’en 2020 (6). Certes, elles sont plus petites mais elles sont gouteuses à souhait. Nous acceptons donc qu’en arrosant moins, voire pas du tout, nous gagnons en saveur.

Géry de Broqueville

  1. Les « mauvaises herbes » ne sont mauvaises que dans la tête des gens. Chez Pas à Pas nous préférons parler d’adventices ou d’herbes indésirables. Or ces herbes sauvages ont très souvent une valeur nutritive et ont un caractère bio-indicateur du sol. Certains maraîchers sèment des engrais verts qu’il enfouissent, ensuite, dans le sol.
  2. Maraîcher bio : la Finca.
  3. Biner : consiste à rendre meuble superficiellement le sol en brisant la croûte qui se forme sous l’effet des pluies et des arrosages. L’eau pénètre plus facilement dans la terre et a tendance à ne pas s’évaporer trop vite, d’où le dicton « un binage vaut deux arrosages ». Il en est de même pour l’air. Les micro-organismes en bonne santé favorisent la croissance des plantes.
  4. Nous avons vérifié si cette rumeur était fondée ou pas. Dans le cahier des charges du label « Ecocert » imposé par l’Union européenne pour devenir bio, il existe un chapitre composé de deux articles. Il y est dit ceci que « si et seulement si » l’agriculteur se trouve en pénurie de produits phytosanitaires agréé bio avec l’accord du Ministère de l’agriculture de son pays, il peut utiliser des produits chimiques de synthèse. C’est la porte ouverte à tous les abus selon certains.
  5. Ce dernier travaille la terre dans une région montagneuse de l’Hérault, du côté de Lodève. Son exploitation a pris le nom de Potager de Santé. Il est producteur de semences. L’Hérault reçoit entre 450 et 500 mm de pluie par an.
  6. Peut-être que sa botte secrète est la pulvérisation de bardane comme nous en avons parlé dernièrement. 😉
  7. En 2021, les tomates ont été ravagée par le mildiou qui s’est propagé avec une rapidité foudroyante après les fortes pluies de la mi-juillet.
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